vendredi, juin 09, 2006

Coeur de tauren.


Les yeux clos, elle sent la chaleur de la roche traverser sa tunique et une brise légère caresser son visage. Qu'il est bon de vivre dans les verdoyantes plaines de Mulgore. Le soleil de l'après-midi poursuit sa course dans un ciel qu'aucun nuage ne trouble, continuant de chauffer la large roche plate occupée par la chamane.

Un léger bruit en contrebas la fait sursauter, elle se redresse rapidement tout sens en éveil. Serait-ce son dîner qui s'annonce ? Il semble que non. Un tauren immense, la fourrure aussi noire que ses cornes, se tient quelques mètres plus bas l'air féroce.
L'orquesse se lève calmement, un sourire carnassier dévoile deux petites défenses acérées. Elle crache nonchalamment la brindille qu'elle mâchouillait pour saluer du salut tauren traditionnel, celui qui trouble ainsi sa tranquillité. Sans prévenir, avec une rapidité étonnante, elle bondit sur le tauren. Celui-ci avait l'air de s'y attendre, aussitôt le salut de la chamane terminé, il s'est calé sur ses jambes afin de ne pas être emporté par l'élan de son assaillante. L'orquesse est souple et rapide mais le tauren terriblement résistant. Il encaisse sans broncher les coups qu'elle lui porte. Elle s'est accrochée sur son dos et s'obstine à vouloir le faire ployer, jusqu'à poser un genou à terre. Sans grand résultat. Une idée semble enfin jaillir dans cette tête verte amenant un large sourire. Doldwyn descend prestement du dos tauren et se met à chatouiller les côtes de ce dernier. Le tauren éclate d'un grand rire qui résonne dans la vallée, et s'assied vaincu.


« Rhaaa nan Doldy, c'pas du jeu ! »

L'orquesse éclate de rire à son tour avant de se laisser tomber au sol essoufflée par cette lutte acharnée.

Les deux amis discutent des derniers potins du village jusqu'à la tombée de la nuit. Tant pis pour la chasse songe Doldwyn en regardant avec tendresse son ami d'enfance. Elle le connaît depuis toujours. Aussi loin que remonte ses souvenirs, Quaïvat était présent, taquin, joyeux, rassurant, grognon parfois et toujours beaucoup, beaucoup plus grand qu'elle pour son plus grand agacement.




La chamane aurait donné n'importe quoi pour être tauren. Elle l'est de cœur et d'esprit, elle l'est par adoption, sa mère taurine lui a toujours dit qu'elle l'est bien plus que certains des leurs... mais sa peau est verte, sans cette abondante fourrure dans laquelle elle aime se nicher quand la tristesse la gagne. Elle n'aura jamais l'allure majestueuse de son ami, ni sa grande taille. Le sujet est une plaisanterie entre eux depuis qu'ils sont tout petits. Sa famille adoptive a toujours vécut à côté de la famille de Quaïvat. Sa mère lui a raconté que le jeune tauren avait été intrigué par sa peau verte, lorsqu’elle fut ramenée vagissante au foyer voisin. Son père adoptif l'aurait trouvé sur les bords du lac situé prés du village de Bloodhoof. Ce qu'un bébé orc faisait tout seul là, mystère. Le couple se décida à l'emmener à l'orphelinat d’Orgrimmar, mais arrivé sur place, ils n’eurent pas le courage de la laisser. Trop de petits orcs et trolls pullulaient déjà dans ce triste endroit. Et puis elle serait bien mieux au grand air de Mulgore que dans l'étouffante capitale. Evidemment, il y avait peu de chance que tous les taurens voient cette adoption d'un bon œil mais les deux taurens, druides de surcroît n'en avaient cure. La plaine leur avait donné ce que la nature leur refusait, un enfant. Un enfant à la peau verte certes mais un enfant avant tout, et personne au monde n’auraient pu leur enlever.

Doldwyn n'a jamais cherché à savoir d'où elle venait, sans importance pense t'elle alors qu'elle contemple le paysage qui s'étend devant elle. Sa famille est taurene, son cœur appartient à la plaine, et chaque jour en regardant le ciel de Mulgore, elle remercie les esprits des anciens pour ce qu'ils lui ont apporté.



L'orquesse finit par se lever alors que les derniers rayons du soleil disparaissent derrières les flancs escarpés de la montagne. Elle colle une grande claque dans le dos de Quaïvat :

« On y va mon grand ?! Il y a de la viande au dîner ce soir ! ».

Le guerrier la regarde, une lueur amusée dans le regard, acquiesce, se redresse de toute sa taille et sans prévenir attrape son amie par la taille pour la jucher sur ses larges épaules. Les deux comparses éclatent de rire devant l'air ébahit d'un troupeau de kodos. Quaïvat dévale la pente en courant, la chamane toujours sur ses épaules, formant ainsi une étrange ombre sur le sol dans la lumière du couchant.